KAYANZA, 3 sept (ABP) – Mme S Citegetse(photo) a été violée par trois hommes pendant la crise qui a suivi l’assassinat, en 1993 du président burundais, Melchior Ndadaye. C’était au cours d’une attaque armée en commune Kabarore où elle était mariée.

Le lendemain, son mari l’a accompagnée à l’hôpital pour avoir les soins de santé. Mais, il l’a renvoyée juste après disant qu’il ne peut pas garder une femme qui a été violée par plusieurs hommes. Elle remercie Dieu de n’avoir pas été contaminée du VIH/Sida et d’autres IST par « ces démons nocturnes ».

Sa famille de naissance ne l’a pas accueillie à bras ouverts. Elle l’a maltraitée jusqu’à ce qu’elle devienne comme une folle surtout après le décès de son père. Elle a décidé de partir et a été accueillie au chef-lieu de la province Kayanza par Mme Léoncie Nshimirimana, représentante légale de la coalition Murekerisoni, une leader collaboratrice de ACORD qu’elle surnomme Maman Sua. Elle l’aide plusieurs fois à obtenir des aides (pagne, houe, habits).

« J’ai engagé un procès en vue d’avoir une portion de terre où je suis née. Je suis arrivée même au ministère de la Justice, munie d’une lettre d’orientation du CDFC (Centre de développement familial et communautaire) de Kayanza mais j’ai perdu. Quelqu’un qui est venu me signifier le jugement a lu que j’ai perdu et que je ne peux rien hériter dans ma famille de naissance. Pourtant, je suis l’ainée de la famille. Cela me fait souffrir. Nous sommes nés à trois, deux filles et un garçon». Mme Citegetse est des fois désespérée parce qu’elle n’a pas de domicile fixe. Je vais mourir en errant avec des enfants (elle élève ses petits enfants).

« Heureusement que j’ai une autre maman qui me donne à manger quand j’ai faim, qui loue la maison où je vis maintenant au moment où les membres de ma famille m’ont rejeté comme on jette les déchets. Les autres membres de la coalition Murekerisoni de Kayanza qui ont des moyens m’assistent aussi en m’offrant soit un kg de farine, soit un peu d’argent. M. Méchak Ndayegamiye, le fils de Maman Sua m’aide aussi. Je lui souhaite une promotion aux échelons supérieurs ».

Mme Citegetse prie le seigneur pour qu’il l’aide à trouver un acquéreur d’une petite parcelle lui achetée par son père avant sa mort afin d’avoir de l’argent qui lui permettra d’avoir un logement ailleurs. « La maison dans laquelle je vis maintenant est minable et risque de s’écrouler sur moi ».

Citegetse souffre également à cause de sa fille benjamine qui a abandonné les études en 6ème année primaire et est partie avec un homme à Kamara, site minier situé en province Muyinga.

Agricultrice sans terre, Citegetse travaille pour les autres et rentre très fatiguée avec une rémunération minable variant entre 1200 FBu et 1 500 FBu par jour, le prix d’un kg de farine. « Quand je ne cultive pas pour ceux qui ont des terres, je dorme le ventre vide à moins que Maman Sua m’assiste. Si j’avais de propriété foncière, je ne mourais pas de chagrin comme aujourd’hui ».

« Je prends de l’âge. J’ai 60 ans. Le travail avec la houe m’épuise. Je suis malheureuse. Mourir en travaillant pour les autres, c’est dur. Si j’avais un petit capital, je me reposerais au marché en vendant les légumes par exemple ». Elle affirme que la vente des légumes est rentable. Elle a fait l’activité pendant une certaine période et l’a arrêtée après avoir eu un accident qui l’a clouée à la maison pendant trois mois. Le petit bétail, comme les chèvres lui permettrait d’avoir un revenu en vendant du fumier.

« Je remercie Dieu qui m’a tiré du gouffre et qui m’a donné la paix. Mon Dieu, tu m’as délivré du mal et tu m’as donné la paix. Je vis encore parce que j’ai trouvé vous les papas et les mamans. Grâce à Maman Sua, j’ai la paix. Quand je vois vous mes parents arriver, j’ai la joie », s’adresse-t-elle à une délégation de ACORD qui lui rendait visite à domicile.

Selon Mme Nicelatte Niyongere, coordonnatrice du programme Genre et inclusion sociale à l’ONG ACORD Burundi, les leaders communautaires doivent continuer à travailler pour que Mme Citegetse obtienne la justice. D’après elle, un jugement rendu peut être revu s’il y a eu erreur. Elle a demandé à Mme Léoncie Nshimirimana de chercher d’autres voies à exploiter pour que la victime aie une portion de la terre familiale d’autant plus qu’elle a été chassée par son époux.

Pratiquement les femmes n’ont pas droit à la terre dans notre pays. Il faut que la loi qui musèle les femmes soit changée.

Comme le gouvernement affecte une ligne budgétaire à l’assistance judiciaire des victimes des VBG (violences basées sur le genre), Mme Niyongere a recommandé aux leaders communautaires de contacter le responsable du CDFC Kayanza pour qu’elle l’aide à trouver un avocat.

M. Méchak Ndayegamiye, membre de la coalition Murekerisoni promet que le collectif va tout faire pour que Mme Citegetse hérite une terre chez ses parents. Il a espoir que cela est possible si les juges arrivent sur terrain et interrogent les voisins.

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